Une bande de Carolos à Gaza - Lire l'article en cliquant sur le lien ci-dessous

Retour à Luxembourg

Les marcheurs sont de retour à Luxembourg. Ils vous racontent leur vécu, leur expérience ... Eux-mêmes et d'autres marcheurs de Belgique, de France ..., font le bilan et préparent des suites à cette action dans leur pays, au Luxembourg, en Europe. Restez connectés et en alerte !

jeudi 17 décembre 2009

Où en est Gaza ?

Intervention de Marianne Blume, lors de la formation préparatoire à la marche pour Gaza, à Bruxelles le 12-12-2009 : quelques aspects de la situation de Gaza hier et aujourd’hui.

Aperçu général de Gaza (quelques éléments tirés de Wikipedia)
➢ La bande de Gaza possède 11km de frontière environ avec l'Égypte (avec le poste-frontière de Rafah), 51km de frontière avec Israël (avec le poste-frontière d'Erez), 40km de côtes le long de la Méditerranée. Sa superficie est de 360km2.
➢ Environ 1,5 million de Palestiniens vivent dans la bande de Gaza, principalement des descendants des réfugiés de la guerre de 1948.
➢ La densité de la population est importante avec environ 4.000 hab/km2.
➢ Après le départ des populations israéliennes en 2005, la majorité des habitants est musulmane avec des minorités chrétiennes (0,7%).
➢ Les premières colonies y avaient été implantées dans les années 1970 et utilisaient 80% des faibles ressources hydrauliques de ce territoire. En 2005, les colonies sont démantelées suite au Plan unilatéral de désengagement par Israël.
➢ Parmi les problèmes cruciaux : l’approvisionnement en eau ; la menace croissante des pollutions ; depuis 1967, l’économie de Gaza est totalement intégrée au marché israélien dont elle est devenue totalement dépendante. Gaza est totalement dépendante d'Israël aussi pour la fourniture de son électricité et de son carburant. C’est dire que le blocus israélien, en plus des effets directs sur les conditions de vie de la population dans tous les domaines, a complètement étouffé l’économie de Gaza.
➢ Jusqu’à la prise de pouvoir du Hamas à Gaza, l'Autorité palestinienne a assuré la survie artificielle de l'économie en hypertrophiant le secteur public, principalement les services de sécurité, grâce aux subventions internationales, surtout de l'Union Européenne. À l’époque, près d'un Gazaoui sur trois était rémunéré par l'Autorité palestinienne.

Avant Oslo et le « désengagement » israélien

Peu le savent : c’est depuis Oslo qu’il y a un mur-clôture électrifié tout autour de Gaza, ainsi qu’une « buffer zone » : 100 mètres de no mans land pris sur les terres palestiniennes ainsi qu’un chemin pour les jeeps et des détecteurs de mouvement.
Il y a deux grands points d’entrée et de sortie :
Erez, au nord, depuis Israël
Rafah, au sud, pour l’Égypte.
Une route traverse tout Gaza, du sud au nord, la route Saladin. Beaucoup des routes qui traversent Gaza transversalement étaient des routes réservées aux colons, si bien que Gaza aussi était morcelée en de nombreuses pièces de puzzle sans communication ou avec des communications très difficiles
60 000 travailleurs gazaouis allaient travailler quotidiennement en Israël avant Oslo. Après Oslo, le nombre de travailleurs a fortement diminué, donc aussi les revenus des familles, d’autant plus que ces travailleurs étaient très mal payés.

Erez :
À l’entrée de Gaza, au nord, se trouvent Erez, ainsi que, avant Oslo, de nombreuses colonies de pêche et colonies industrielles à la limite du territoire : entreprises souvent polluantes, avec des travailleurs sans droits. Aujourd’hui, cette zone n’existe plus, mais, à la frontière, Israël continue régulièrement de tirer si bien qu’il n’y a pas de culture ni d’agriculture possibles.
La route reliant la colonie de Netzarim au passage de Karni à l’Est et à Erez au Nord était souvent bloquée par Israël, ce qui contribuait à couper Gaza trois morceaux.

Rafah :
La frontière était tenue par les Israéliens – Peu ou pas d’étrangers ne pouvaient entrer. Aujourd’hui, Israël s’est retiré du terrain. Il y a des observateurs européens chargés de contrôler, avec les Égyptiens, le trafic de Rafah ; il y a contrôle des papiers et tous les renseignements sont transmis aux Israéliens. Ces contrôleurs européens étaient installés en Israël et essentiellement à l’ordre des Israéliens.

Le Gush Kativ
Dans une zone aride s’étirant du centre ouest jusqu’au sud-ouest, il constituait un groupement de colonies agricoles. Le montant total des exportations du Gush Katif (dont les tomates cerises exportées en Europe) atteignait 200 millions de dollars par an et représentait 15% des exportations agricoles d’Israël. Dans cette région, les Palestiniens étaient emprisonnés entre de nombreux check points. Les routes transversales étant souvent barrées et, les autres routes vers la frontière israélienne à l’Est étant réservées aux colons, c’est un 4e morceau de puzzle de Gaza qui était ainsi constitué. L’aéroport payé par les Européens et détruit par les Israéliens, est désormais impossible à utiliser.

Cette zone est couverte de check points ; le long des routes, tous les arbres coupés. Une grande partie de l’eau, à proximité de la mer, était pompée par les colonies et l’est encore aujourd’hui au profit d’Israël. La nappe phréatique est envahie par le sel, a été et est encore polluée par les industries chimiques, la grande station sud d’épuration des eaux ayant été détruite par l’armée israélienne.
Gaza était connue pour ses oranges, ses pamplemousses et ses citrons. Aujourd’hui, la pollution des eaux est telle que ces cultures sont devenues aléatoires sinon impossibles.

Après Oslo :

22 miles marins avaient été concédés aux Palestiniens pour la pêche. Ils se sont progressivement réduits à 12 miles puis à 6 miles puis aujourd’hui encore moins. La pêche palestinienne se trouve donc pratiquement anéantie. Si on pêche dans ces eaux de quelques miles, fréquentées par les petits poissons, on tue les ressources futures. Quel autre choix ?

À gauche et à droite de cette zone sud de pêche, deux zones sont interdites de pêche : les vedettes israéliennes y patrouillent constamment et infligent divers types de punitions aux Palestiniens qui dépassent les limites

Gaza, une prison sans ciel ouvert ! Si Gaza est une prison, découpée en quartiers sans communication, elle est aussi une prison fermée par un couvercle qui lui sert de plafond : patrouilles incessantes d’avions, bombes soniques (avec bris des vitres, états de choc très perturbants), etc.

Gaza sous blocus
Le blocus a commencé déjà avant les élections 2006 et a véritablement provoqué un dé-développement de la région. L’habitude au blocus s’est créée depuis longtemps.
L’UE a voulu favoriser le développement local, avec de grosses entreprises de productions de fruits, de jus … Mais à partir de 1996 (révolte dans les Territoires), Gaza a été bloquée et reste fermée par Israël. L’Égypte, de son côté, est aussi fermée. Dès lors, vu que les manques les plus fondamentaux et les plus divers se poursuivent depuis plus de 10 ans, c’est toute l’économie de Gaza qui est démantelée sinon détruite.
Les autres passages pour marchandises sont contrôlés par Israël ; les produits interdits sont très nombreux, y compris des produits vitaux, dont, par exemple, le papier … (par peur que le Hamas utilise ces produits pour fabriquer des qassams, des tracts anti-israéliens …). Les conséquences sont graves dans de nombreux domaines, dont le domaine scolaire.

Précédemment, ± 4000 types de marchandises pouvaient passer ; aujourd’hui, entre 40 à 50 ! Le sucre est interdit car du sucre + de l’engrais peuvent être utilisés pour faire des bombes ; le chocolat est interdit … Les permissions et les interdictions paraissent arbitraires ; en fait, comme l’ont dit clairement certains responsables israéliens, les entrées sont limitées à ce qui doit permettre aux gens de « survivre », juste de quoi ne pas mourir. Argent et biens entrent juste pour que la crise humanitaire ne soit pas trop radicale: 80% des gens vivent aujourd’hui en dessous du seuil de pauvreté – il y a 45 % de chômage...

Kerem Schalom est un point de passage au sud-est, au coin de la frontière entre Gaza, Israël et l’Égypte. Lors du passage de marchandises, tout contact est évité par les Israéliens avec le Hamas : les marchandises sont jetées sur une plateforme vide de Palestiniens et sans lumières – Les Palestiniens doivent téléphoner à l’autorité militaire pour savoir quand les marchandises passeront. Les Israéliens les font souvent attendre longtemps (des médicaments traînent parfois des semaines) et des files de camions attendent le passage, vers l’extérieur et vers l’intérieur.
Ce sont les militaires israéliens qui décident au jour le jour quels produits pourront passer, sans en fournir de liste à l’avance. Les Palestiniens doivent téléphoner chaque jour pour savoir ce qui pourra entrer. Le choix des marchandises opéré par les militaires dépend du marché israélien : ils envoient d’abord les produits en surplus en Israël, sans tenir compte des besoins ou des demandes des Gazaouis. Les Israéliens trafiquent aussi les conserves, en changeant leurs dates de péremption.

Quel État palestinien ?
Comment créer un État palestinien dont les deux entités géographiques principales : la Cisjordanie et Gaza restent coupées l’une de l’autre, sans communication ? Les liens sont imaginés, espérés, rêvés, mais jamais réalisés. De plus, les deux entités sont très différentes à de nombreux points de vue. Jusque 1967, Gaza était sous autorité égyptienne et la Cisjordanie sous autorité jordanienne. Les systèmes d’éducation étaient très différents, ainsi que les modes de vie …

Les bombardements lors de la guerre de décembre 2008-janvier 2009
Les moins de 15 ans représentent 48% de la population gazaouie (Recensement palestinien de 2007). 75% des habitants sont des réfugiés de Ash Dot. Les principaux camps de réfugiés sont Jabalya dans le Nord, le camp de la plage, le centre de Gaza, Deir Ballah, Kan Younis et Nuserat.
Les camps n’étaient plus constitués de tentes, mais de maisons en dur. À Gaza coexistent souvent des maisons très riches et de véritables gourbis. C’est l’un des contrastes visibles à Gaza et en Cisjordanie.
Les camps sont régis par l’UNWRA (organisation des Nations-Unies pour les réfugiés palestiniens) avec ses écoles, ses cliniques temporaires. Le plus souvent, il n’y a pas d’égouts ni de conduites électriques. Cette situation a été un peu améliorée par l’AP, mais de manière très limitée et avec beaucoup de temps, vu que, théoriquement, cette situation des réfugiés est considérée comme provisoire. Il n’empêche : certains camps sont relativement développés, tandis que d’autres restent vraiment sous-développés.

Les bombardements israéliens ne datent pas de 2008-2009. Entre 2000 et 2006, les bombardements et les incursions ont été quotidiens. Pour la plupart des Gazaouis, les nuits ont été et restent des moments dramatiques : l’angoisse monte progressivement au cours des nuits, ainsi que la peur des bombardements ; il est difficile d’endormir les enfants. Le stress des enfants et parents est permanent et profond, insupportable, sans qu’ils puissent en sortir ; les gens sont souvent très fatigués, fument beaucoup, etc.

Les habitants ont donc l’impression de vivre dans un zoo. Il faut d’ailleurs s’attendre à et comprendre certaines réactions négatives de gens qui se sentent regardés comme des animaux traqués et enfermés. Mais tout autant, les réactions peuvent être très bonnes et très positives, dans la mesure où ils peuvent aussi voir dans les étrangers, entre autres dans les Européens, des observateurs qui vont témoigner et agir à leur retour. C’est important, car, au cours des dernières années, la désillusion des Palestiniens par rapport à l’Europe n’a cessé de croître, à la mesure des espoirs qu’ils avaient mis en celle-ci.
La carte des bombardements montre le nombre de bombes jetées par km2. Gaza en est toute trouée. Les gravats sont nombreux, mais les Gazaouis en récupèrent tout ce qu’ils peuvent et reconstruisent avec des morceaux de béton, de la terre, du sable et des coquillages. Beaucoup de gens vivent à nouveau sous tente. Globalement, pour beaucoup, les conditions de vie ont énormément régressé.

Les destructions :

Sans parler des 1400 tués et des milliers de blessés dont beaucoup resteront handicapés à vie, ont été détruites toutes les infrastructures et institutions civiles et de service public : stations de police, la plupart des ministères, le Parlement, la résidence présidentielle, des écoles de l’ONU, des mosquées, des universités, la principale centrale électrique, des stations d’épuration, des centaines d’entreprises agricoles et industrielles … L’électricité vient d’Israël, selon des quotas ; elle est souvent coupée (4h ou 6h par jour, sans savoir quand l’électricité va venir : on attend l’eau ou l’électricité).

Le principal centre d’épuration des eaux a été bombardé et détruit. 80 000 m2 d’eau usée ont été versés dans la mer sans épuration. Et cela continue.
La nappe phréatique s’épuise et les Gazaouis doivent acheter leur l’eau à Israël.
Au nord, les lagunes sont polluées par les eaux usées qui deviennent impropres à l’agriculture.

À Gaza aujourd’hui cohabitent des maisons détruites et cassées avec de superbes maisons et des hôtels : c’est l’un des contrastes de ce territoire.
Les gens sont dans une situation bizarre : il y en a qui ont une maison, il y en a gens qui n’en ont pas ou qui n’en ont plus ; la solidarité est entamée : « les Israéliens nous ont ramenés au niveau de bêtes » disait un Gazoui. « Nous les ramènerons au Moyen Age », avait dit un dirigeant israélien.

D’autres contrastes sont choquants : certains magasins sont pleins ! la vie continue ! d’autres magasins sont totalement vides ou détruits ! la pauvreté est devenue très grande. En fait, la pauvreté n’est pas affichée en Palestine, elle est peu visible de l’extérieur (à part les destructions) : on voit la pauvreté et la misère seulement si on entre dans maisons.

Les tunnels et le mur

Les tunnels avec l’Égypte sont le véritable poumon de Gaza par les marchandises qui sont acheminées par le commerce (de contrebande) qu’il génère, par les bénéfices qu’ils rapportent à ceux qui en ont les moyens, par les entreprises familiales qui en survivent, par les taxes prélevées sur les tunnels et les marchandises qui y transitent — l’une des conséquences en étant que les marchandises sont très chères. De plus, par les tunnels, passent beaucoup de marchandises avariées.

Le mur actuel avec l’Égypte avait 4m de profondeur. Depuis que les Palestiniens en ont détruit un morceau, les contrôles et la surveillance égyptiens se sont accrus. L’Égypte aurait lancé récemment la construction d'un mur (complémentaire) séparant sa frontière de celle de la bande de Gaza et décidé d'enfouir des plaques métalliques jusqu'à 20 ou 30 mètres sous terre pour empêcher les tunnels de fonctionner. Il faut dire qu’Israël et l’Égypte sont en tête de liste dans les pays qui reçoivent le plus d’argent des USA. L’Égypte obéit jusqu’à un certain point aux ordres des Etats-Unis et aux injonctions d’Israël. Cependant, d’un autre côté, laisser entrer les Gazaouis en Égypte, ouvrir la frontière aux marchandises égyptiennes, aurait pour conséquence de dédouaner Israël de son blocus de Gaza.

Peu de reconstructions
Peu de bâtiments sont reconstruits, les matériaux de construction étant interdits d’entrée par les Israéliens. Les écoles ne sont pas reconstruites ; les cours sont donnés à moins d’étudiants ; les enfants et les jeunes sont stressés, incapables d’attention, alors que les enseignants étaient très motivés … Les enfants font preuve d’une violence très grande ; dès qu’il y a un problème, on assiste rapidement à des « guerres » internes.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire